Montrez ce lien, que je ne saurais voir
Vingt-quatrième petit mystère :
« Visible mending (VM) »
Visible mending (VM), en français raccommodage visible, souvent fait de façon ostensible et colorée.
Pour Aurélia Gualdo, doctorante en anthropologie à l’EHESS (École des hautes études en sciences sociales) : « L’histoire de la réparation vestimentaire est aussi ancienne que celle des textiles, mais pendant des siècles, les raccommodages devaient être invisibles, et les vêtements rapiécés des pauvres étaient synonymes de honte ».
« La mère et la fille entretenaient tout le linge de la maison, et employaient si consciencieusement leurs journées à ce véritable labeur d’ouvrière que, si Eugénie voulait broder une collerette à sa mère, elle était forcée de prendre sur ses heures de sommeil en trompant son père pour avoir de la lumière. »
Extrait d’Eugénie Grandet, Honoré de Balzac (1833).
Ravaudage (de jeans), rapiéçage, raccommodage et broderie (au fil d’or sur trou de mites) bien visibles sont devenus le summum de la branchitude (engagée), synonymes de conscience écologique pour un monde plus durable. Pour s’ériger contre la fast fashion, la surconsommation, le gaspillage, certains rêvent même que la réparation redevienne la norme, un artisanat pertinent, un art. Que nos textiles redeviennent nos propriétés les plus précieuses, comme ils le furent pendant des siècles, quand il s’agissait de les traiter avec soin et qu’on pouvait les transmettre aux générations futures.
Pour cela, il suffit d’un fil coloré et d’une aiguille. D’un peu de temps et d’imagination.
P.-S. : pour le lieu de cet article, nous avons choisi Dacca (capitale du Bangladesh), car dans sa thèse qui porte sur la réparation dans la mode, Aurélia Gualdo observe sa montée en puissance depuis l’effondrement du Rana Plaza le 24 avril 2013, entraînant la mort de 1 130 ouvrier(e)s textile travaillant pour les grandes marques de la mode.