Le métier de correcteur peut disparaître !
Quinzième petit mystère :
« l’ordre des lettres »
Quand j’ai acheté mon iPhone, ma fille Mélanie, pour se moquer de mon manque de dextérité face à cet outil, et de mon étourderie en général, s’est empressée d’y écrire le mémo suivant : Aehtcer un Iohnpe puor Minéale pcrae que de ttuoe foçan je ne sias pas m’en sverir et je vias le cessar.
Vous avez tout compris, n’est-ce pas ?
En fait, Mélanie faisait référence à une prétendue théorie de l’université de Cambridge :
Sleon une édtue de l’Uvinertisé de Cmabrigde, l’odrre des ltteers dnas un mot n’a pas d’ipmrotncae, la suele coshe ipmrotnate est que la pmeirère et la drenèire soeint à la bnnoe pclae. Le rsete peut êrte dnas un dsérorde ttoal et vuos puoevz tujoruos lrie snas porlbème. C’est prace que le creaveu hmauin ne lit pas chuaqe ltetre ell-mmêe, mias le mot cmome un tuot. La peruve…
Pour ceux qui ont envie de le lire en anglais, cela donne :
« Aoccdrnig to rscheearch at Cmabrigde Uinervtisy, it deosn’t mttaer in waht oredr the ltteers in a wrod are, the olny iprmoetnt tihng is taht the frist and lsat ltteer be at the rghit pclae.
The rset can be a total mses and you can sitll raed it wouthit a porbelm. Tihs is bcuseae the huamn mnid deos not raed ervey lteter by istlef, but the wrod as a wlohe. »
Eh bien ce n’est pas vrai !
La preuve :
(Nous avons respecté la seule règle édictée, à savoir les premières et dernières lettres des mots sont à la bonne place.)
LA CDECANE DE CET OTIAROO SELBME ECVSSEIXE PUOR UN CEITVALICNSE NTPOÉYHE.
Vous n’avez rien compris, n’est-ce pas ?
Il est maintenant clair que la lecture du texte proposé par l’auteur a été rendue possible grâce à la combinaison de deux facteurs. Tout d’abord, les lettres ont été mélangées de façon à ne pas trop troubler la morphologie générale des mots ; d’autre part, les indices sémantiques fournis par le contexte ont permis une lecture du type « réaction en chaîne ». Par exemple, après le mot « Uvinertisé », nous avons « de », donc on se doute qu’il y aura ensuite un nom de ville, etc. Il y a enfin beaucoup de mots courts (2, 3 ou 4 lettres).
Un bon lecteur qui maîtrise parfaitement le code alphabétique, qui est capable d’anticiper en fonction du sens défini par le contexte, peut lire un texte même si les mots de celui-ci ont été remaniés (lettres déplacées voire partiellement supprimées). Cette lecture est rendue d’autant plus aisée que les indices sémantiques sont forts et que la morphologie des mots reste proche de la réalité. Toutefois, en dernier recours, c’est toujours le code qui garantit l’exactitude de la lecture.
Donc pas de panique amis correcteurs, nous avons encore besoin de vous !
Et pour ceux qui veulent déchiffrer la phrase en majuscules, la voici dans l’ordre : LA CADENCE DE CET ORATORIO SEMBLE EXCESSIVE POUR UN CLAVECINISTE NÉOPHYTE.
P.S. : il est très facile de faire beaucoup plus compliqué… Et donc illisible même pour les très bons lecteurs.