WEBZINE N° 5
Hiver 2007/2008
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348 - Rien n’est parfait
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Les rêveries d’Hibernatus
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Rencontre avec des êtres extraordinaires

Il est de ces gens dont la rencontre vous ébranle. Par leur volonté et leur intelligence de l’autre. Par leur façon de voir la vie et de la vivre. Par leur engagement dans notre société.

Vous vous sentez grandis de les avoir approchés, regardés ou entendus. Leurs engagements sont pourtant modestes. Ils passent souvent même inaperçus. Ces êtres sont presque anonymes, mais uniquement pour ceux qui sont loin d’eux.
Nous avons voulu leur rendre hommage. Vous les faire rencontrer.

Le dernier des guérisseurs

 

Avant de découvrir le personnage, j’ai été interpellée par son activité : avenue Parmentier dans le 11e, une petite boutique toute jaune. Pleine de baigneurs, et aussi pleine de bras, de jambes, de têtes. En celluloïd.

 

 

Henry Launay qui fêtera le 24 février ses 81 ans est sur le pied de guerre dès 9 heures. Il me reçoit en réparant un beau baigneur : il y a bien longtemps, un enfant lui a enfoncé un œil. Henry pourra changer la paire d’yeux : en mettre des dormeurs ou des « riboulants ». Il en a tout un stock.

Un stock unique de pièces détachées qu’il a acquis et qui lui permet de réparer les baigneurs en celluloïd. Depuis qu’on les a retirés de la consommation en 1965 (le celluloïd est un produit inflammable), personne n’en fabrique plus.

 

 

Pourtant on en a fabriqué ! Les premiers, ceux de la marque Petitcollin, sont apparus en 1912. Avant, dès 1870-1880, il y avait les poupées avec la tête en biscuit (porcelaine cuite deux fois). Puis on a inventé les poupées incassables avec la tête en carton-pâte.

 

 

Quand on lui amène ces poupées, il est pour les clients comme un guérisseur qui redonnerait vie à leur enfant. Avant, un jouet était considéré comme superflu. On faisait un grand sacrifice pour en acquérir un. Pour un enfant malade par exemple. Et il n’en avait qu’un. Ses clients sont, pour la plupart, âgés. Il en a aussi des plus jeunes (40-50 ans) qui lui amènent leur ours en peluche. Tout râpé.

Henry en fait était électricien. Il y a 44 ans, il a ouvert une petite boutique de réparation d’articles de voyage et de parapluies. Ce sont ses clients du quartier qui ont commencé à lui amener leurs poupées. Il a dû tout apprendre par lui-même. S’inventer des outils. Des techniques de travail.

Et il s’est pris de passion pour ces enfants de celluloïd. Toujours émerveillé des mécanismes sophistiqués comme celui pour imiter les pleurs. Henry aime aussi sa Harley qu’il chevauche à la campagne. Pour le vélo, il commence à trouver les côtes un peu raides. À Paris, il prend son scooter.

 

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Photos © 4ine.


Henry Launay

Voici les coordonnés du magasin :
114, avenue Parmentier, 75011 Paris - tél : 01 43 57 09 02

Cet article est tir du numro 5 du webzine https://www.lesmotsdesanges.com/V2 imagin par 4ine et ses invits
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